Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.
Auteur : Christian Nidegger
Organisation affiliée : Ambassade des Etats -Unis
Type de publication : Rapport
Date de publication : 2015
Lien vers le document original
Contexte et situation actuelle :
Plusieurs ministères sont en charge de l’éducation avec notamment la séparation, comme dans d’autres pays, entre le primaire et le secondaire. Cette séparation n’existait pas à l’origine. Elle est même relativement récente (moins d’une dizaine d’années). La plupart des acteurs interrogés trouvent cette séparation peu adéquate. Cependant de l’avis de plusieurs acteurs, une simple fusion des ministères actuels ne résoudrait pas toutes les questions actuelles en termes d’évaluation du système scolaire.
Plusieurs évaluations réalisées ces douze dernières années, le plus souvent par des instances externes au Bénin (voir annexe 2), montrent des compétences assez faibles des élèves au primaire. Par ailleurs, actuellement un processus général de déconcentration et de décentralisation du système scolaire visant à donner plus de responsabilité aux acteurs locaux est en train de se développer.
Les travaux d’évaluation relèvent des différents ministères et à l’intérieur de ces ministères de plusieurs instances aux responsabilités et aux compétences variées. Pour l’analyse de la situation de l’évaluation, nous appuierons sur la problématique de l’évaluation des acquis des élèves.
Plusieurs évaluations réalisées ces douze dernières années, le plus souvent par des instances externes au Bénin (voir annexe 2), montrent des compétences assez faibles des élèves au primaire. Par ailleurs, actuellement un processus général de déconcentration et de décentralisation du système scolaire visant à donner plus de responsabilité aux acteurs locaux est en train de se développer
L’évaluation des acquis des élèves.
L’évaluation des acquis des élèves en termes de compétences ou de connaissances permet une mesure de l’efficacité des systèmes scolaires. On peut distinguer trois formes d’évaluation des acquis des élèves actuellement réalisées au Bénin: les évaluations faites par les enseignants, les épreuves certificatives de fin de cycle et des évaluations standardisées comme par exemple les enquêtes de type PASEC.
Lorsque l’on parle d’évaluations standardisées, les acteurs sont surtout référence aux épreuves nationales de fin de cycle qui servent à la certification des élèves aux différentes étapes de leur cursus. Ces épreuves sont conçues par des enseignants et sélectionnées dans chaque ordre d’enseignement (primaire et secondaire) par une commission de la direction des examens et concours (DEC) primaire pour les épreuves du primaire et de la DEC secondaire pour les épreuves du secondaire.
La correction est anonyme et est effectuée dans les écoles par les enseignants. Une commission locale décide des élèves qui sont reçus. A priori la moyenne est fixée à la moitié des points. Mais il semble que ces commissions soient parfois plus généreuses. Par ailleurs il est relevé que pour réussir il est nécessaire d’avoir la moyenne dans un certain nombre de disciplines de l’examen. Mais il est possible de réussir l’examen sans maîtriser les compétences dans des domaines considérés habituellement comme centraux comme par exemple le français ou les mathématiques.
Il est mentionné par plusieurs acteurs que ces épreuves nationales ne sont que peu fiables. Elles certifient mais ne permettent d’assurer que les élèves maîtrisent un seuil minimal de compétences. Ceci pose problème pour la poursuite du parcours scolaire des élèves avec risque d’échec et manque d’équité du système.
Il semble qu’il existe un décalage important surtout lorsque l’on change de niveau scolaire sur ce qu’on évalue en termes de compétences de fin de cycle et le contenu de l’examen de concours d’entrée dans le cycle suivant qui est censé porter sur les mêmes compétences mais qui s’appuie en fait sur un autre référentiel.
Les élèves qui bénéficient de meilleures conditions dans leur environnement familial risquent d’être encore plus favorisés dans cette situation. Un problème est soulevé par plusieurs acteurs sur les liens entre les concours et les épreuves certificatives soumises aux élèves.
Il semble qu’il existe un décalage important surtout lorsque l’on change de niveau scolaire sur ce qu’on évalue en termes de compétences de fin de cycle et le contenu de l’examen de concours d’entrée dans le cycle suivant qui est censé porter sur les mêmes compétences mais qui s’appuie en fait sur un autre référentiel.
Les responsables de la DEC soulignent que les épreuves construites actuellement ne sont suffisamment adaptées à la mesure du programme en vigueur construit sur une approche par compétences. La Direction de l’enseignement primaire (DEP) analyse les résultats des examens notamment en termes de résultats par département, mais n’a pas toujours les ressources nécessaires pour les publier suffisamment tôt.
Le but de ces analyses est d’identifier des éléments de nature pédagogique dans le but d’améliorer la formation des enseignants. Par ailleurs, la DEP ne dispose pas des personnels formés pour l’analyse d’évaluations de type monitorage. L’Institut national de formation et de recherche en éducation (INFRE) dans le cadre de ses prestations de formation et de recherche analyse les épreuves certificatives de fin de cycle et fait des recommandations à la DEC concernant la qualité de ces épreuves.
Par ailleurs, l’INFRE réalise chaque année des épreuves standardisées qui sont proposées aux enseignants. Les épreuves sont construites par l’INFRE et sont proposées aux enseignants. Les épreuves sont administrées et corrigées par les enseignants sur une base volontaire. Ainsi ces épreuves ont plutôt une visée diagnostique pour les enseignants.
Elles permettent aux enseignants d’apprécier les compétences de leurs élèves. Il faut également signaler que l’INFRE existait déjà du temps où il y avait qu’un seul ministère de l’éducation. Son champ d’action étendait alors à l’ensemble de la scolarité. Mais du fait que l’INFRE est une structure du MEMP, ses activités sont concentrées sur l’enseignement primaire.
De plus, depuis deux ou trois ans un institut comparable à l’INFRE a été créé pour l’enseignement secondaire. Lorsque l’on évoque les évaluations du PASEC comme évaluations standardisées des compétences des élèves, il ressort que pour la majorité des acteurs consultés, ces évaluations sont peu connues aussi bien du point de vue des résultats que du rôle qu’elles peuvent jouer dans l’évaluation du système scolaire béninois.
Ceci est indirectement confirmé par les membres de l’équipe du PASEC consultés. En effet, ils indiquent que la présentation des résultats organisée auprès de l’ensemble des acteurs de l’éducation n’est souvent pas suivie par l’ensemble des acteurs invités à cette présentation. Par ailleurs, des projets de diffusion au niveau local ont bien été conçus mais n’ont pas pu être mis en œuvre faute de temps et de ressources.
Cependant, les recommandations issues du rapport PASEC, ont amené des changements dans les programmes d’enseignement. De plus, il est à signaler le peu d’écho de l’enquête dans les médias auprès des instances politiques comme par exemple le parlement.
L’évaluation des acquis des élèves, pour plusieurs acteurs, est centrée sur l’idée que cette évaluation doit être utile à leur domaine d’action et permettre des retombées directes sur ce domaine; par exemple que ces évaluations donnent des indications utiles pour la formation des enseignants ou l’amélioration des programmes d’enseignement.
Les acteurs n’ont pas toujours conscience que pour réaliser cet objectif, il est nécessaire de confronter les résultats des acquis des élèves avec des informations de contexte provenant d’autres sources qui parfois n’existent pas ou pas encore. La disponibilité, la qualité et la fiabilité des informations sur le système scolaire devraient être améliorées par la mise en œuvre d’un système d’information nationale en cours de développement.
D’autres composantes à prendre en compte pour le développement système national d’évaluation. D’autres informations seraient à intégrer dans le but d’évaluer le système scolaire : par exemple différentes informations statistiques sur la scolarisation des élèves, leur parcours scolaire. Ces informations devraient être accessibles aux acteurs et à la structure nationale afin de les intégrer dans ses analyses.
Dans ce contexte, la structure nationale d’évaluation utilisera des données recueillies par d’autres instances comme par exemple, la Direction de la planification et de la programmation (DPP). Par ailleurs, les données ne provenant pas de l’évaluation des acquis des élèves dans le cursus scolaire ordinaire comme celles issues de certains projets dans le domaine de la formation professionnelle et de ré-alphabétisation devraient être intégrées au programme d’analyse de la structure nationale d’évaluation.
Mission de la structure nationale d’évaluation
Les éléments décrits ci-dessus mettent en évidence que de nombreuses informations pouvant contribuer à l’évaluation du système scolaires sont recueillies et analysées par différentes instances des ministères de l’éducation.
Cependant, il n’existe pas actuellement de structure nationale d’évaluation.La construction d’une telle structure nationale permettrait mettre en place une stratégie d’évaluation du système scolaire dans son ensemble.
Cette structure devrait bénéficier d’une large autonomie pour mener son travail et disposer de ressources suffisantes et pérennes pour l’accomplissement de ses tâches. Il s’agit également de définir quelles seraient les missions d’une telle structure.
La structure nationale d’évaluation sera amenée par ses travaux et leur diffusion à tous les acteurs à contribuer au développement de la régulation, du contrôle qualité de l’efficacité du système scolaire au moment où la décentralisation du système scolaire se met en place. Par système scolaire, il ne faut pas prendre en compte uniquement ce qui relève de l’enseignement général mais un accent particulier devrait être mis également sur les formations techniques et professionnelles ainsi que sur les projets de réalphabétisation et de validation d’acquis d’expérience.
De plus, la structure nationale s’intéressera aussi bien aux écoles publiques qu’au secteur privé. Il faut souligner qu’un système plus décentralisé nécessite une plus grande attention portée au rendre compte et à la vérification de l’atteinte des objectifs du système scolaire par toutes les entités en charge du système: enseignants, directions d’école, communautés éducatives notamment.
Pour mener à bien son travail elle s’appuiera sur la mesure des compétences des élèves aux différents niveaux de leur parcours scolaire qui sera mis en relation avec les différentes informations disponibles ou recueillies spécifiquement sur le système scolaire, son fonctionnement et les populations qu’il accueille: infrastructures et ressources humaines disponibles, diversité des populations scolarisées par exemple.
L’aspect valorisation et diffusion des résultats est une des tâches cruciales de la structure nationale d’évaluation. Les pistes et recommandations ne doivent pas seulement se faire sous forme de rapport destiné à l’autorité supérieure ou aux diverses instances des ministères chargées des dossiers visés par les recommandations.
L’ensemble des acteurs du système scolaire doivent être également visés et informés (syndicats, parents, monde politique, communautés locales). D’autres supports seront à développer: Web, réseaux sociaux, radios locales, ateliers de présentation ou de formation ciblés. Dans le cadre de la décentralisation en cours de réalisation, la diffusion des résultats et des recommandations de la structure nationale d’évaluation doit donner l’impulsion au développement de compétences métiers au niveau local.
Construction d’une structure nationale d’évaluation
Cette structure nationale pourrait se construire en rassemblant dans une entité autonome un groupe de personnes uniquement dédié à cette tâche. Ce groupe de personnes devrait se composer de personnes ayant les types de profils et de compétences que l’on retrouve dans le groupe en charge des enquêtes du PASEC (pédagogues, sociologues, informaticiens, planificateurs, statisticiens). Cette structure devrait collaborer aussi avec l’université afin de lui confier des mandats d’analyse supplémentaires.
De notre point de vue, dans sa phase de démarrage la structure nationale d’évaluation devrait particulièrement développer et articuler ses travaux selon les trois domaines suivants :
- Etat des lieux des informations disponibles sur le système éducatif : évaluations des acquis des élèves, données sur les élèves, les enseignants, le contexte scolaire (heures enseignées, infrastructures disponibles, équipements, matériel scolaire), les ressources financières.
- Evaluation de la qualité des informations disponibles et de leur possible mise en relation : en collaboration avec les instances responsables de la récolte des informations, examiner les procédures utilisées, leur mise en œuvre réelle et éventuellement les problèmes rencontrés.
- Analyse des résultats aux épreuves nationales et de leur apport à la compréhension du fonctionnement de système éducatif : pour ses premiers travaux la structure nationale d’évaluation pourrait partir des résultats des acquis des élèves mis en relation avec les informations disponibles sur ces élèves et le contexte dans lequel les apprentissages ont été effectués. Pour effectuer ces analyses, on s’appuiera sur les deux points précédents (état des lieux, évaluation de la qualité des informations).
Par ailleurs, ces premières analyses pourraient être comparées avec les résultats de l’enquête PASEC 2014 qui sont en cours de publication.
Avantages et risques d’une structure nationale d’évaluation
– Avantages
Capitalisation de l’expérience et des compétences présentes dans l’ensemble du système scolaire béninois Utilisation de compétences existantes dispersées dans plusieurs entités qui sont regroupées dans une structure unique permettant de meilleures synergies et collaboration entre les personnes. Dynamisation de l’évaluation du système éducatif par une meilleure visibilité de cette problématique. Valorisation de l’utilisation des résultats de l’évaluation et de son contexte pour le pilotage de l’ensemble du système scolaire.
Création de la structure à un moment favorable : valorisation nationale des résultats de l’enquête PASEC et accroissement de la demande d’évaluation du système scolaire dans un processus de rendre compte lié à la décentralisation du système éducatif
– Risques
Ressources insuffisantes mises à disposition de la structure nationale d’évaluation pour qu’elle puisse réaliser son cahier des charges Ajout d’une structure supplémentaire dans des organigrammes déjà complexes Conflits éventuels entre les différents acteurs impliqués dans l’évaluation.