Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.
Auteurs : Gbètoho Fortuné Gankpe, Emeraude Christhosana Gankpe, Aubin Nino Baleba, Laurenda Zinsou, Christian Mesenge
Organisations affiliées : Revue Santé Publique, Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (CODESRIA)
Site de publication : cairn.info
Type de publication : Rapport d’étude
Date de publication : Mars 2018
Au Bénin, plus de 90 % de la population ne bénéficie d’aucune protection sociale selon le rapport de l’« Organisation Internationale du Travail, 2017 ». Face à cette situation, plusieurs stratégies sont mises en œuvre pour étendre le socle de protection sociale dans les pays en développement. Au Bénin, un rôle prépondérant est accordé aux mutuelles de santé avec des politiques gouvernementales parcellaires de couverture universelle de la maladie qui peinent encore à se matérialiser. Cependant, malgré l’expansion de cette mutualisation, les observateurs soulignent l’importance de l’exclusion plus ou moins contrainte des populations défavorisées.
Profil des membres et non-membres des mutuelles de santé
Huit adhérents sur treize (8/13) sont âgés de plus de trente-cinq ans alors qu’ils ne sont que deux sur trente-sept (2/37) parmi les non-adhérents.
Par ailleurs, parmi les adhérents, dix personnes interrogées sur treize sont de sexe masculin alors que cette proportion était beaucoup plus faible chez les non-adhérents. Enfin, on a observé une prédominance de l’ethnie fon sur tous les autres groupes ethniques parmi les adhérents, ce qui n’est pas le cas parmi les non-adhérents.
Huit adhérents sur treize (8/13) sont âgés de plus de trente-cinq ans alors qu’ils ne sont que deux sur trente-sept (2/37) parmi les non-adhérents
Les ménages de moins de dix personnes sont proportionnellement plus nombreux parmi les adhérents que chez les non-adhérents. 11 adhérents sur les 12 qui ont répondu à cette question avaient un revenu mensuel supérieur à 30 000 FCFA alors que près des deux-tiers des non-adhérents (24/37) ont un revenu mensuel inférieur à ce montant.
Importance du capital social dans la volonté d’adhérer on non à la mutuelle
À la question de savoir ce que les individus pensent de la cotisation pour l’assurance-maladie, 16 individus sur 46 dont 2 adhérents pensent qu’il s’agit « d’une forme de protection contre la maladie » ne faisant pas la différence entre une protection contre la maladie et la possibilité de traitement à coût réduit en cas de maladie.
Certains adhérents ont fait observer que leur adhésion avait principalement pour but de protéger leur famille (les adhésions « familles » étaient proposées par les mutuelles) face au risque maladie estimant qu’eux-mêmes ne tombaient pas souvent malades.
La quasi-totalité des adhérents (10 sur 13) a exprimé la nécessité d’avoir confiance aux responsables mutualistes, aux pairs mutualistes, à la présence d’un leader au sein du groupe avant d’adhérer à une institution mutualiste.
Dans le groupe des non-adhérents, beaucoup avaient exprimé leur méfiance par rapport aux responsables mutualistes. L’argument évoqué faisait référence à la situation de fraudes organisée par une structure de microfinance en 2008 au Bénin qui avait spolié ses membres en leur promettant des taux d’intérêt hors norme.
Discussion
Cette enquête transversale menée à Parakou est un reflet de l’un des problèmes des mutuelles de santé au Bénin qui est le faible taux d’adhésion remettant en question la viabilité même de ces structures. Les caractéristiques définissant le profil des adhérents ont été largement étudiées dans la littérature. Les facteurs identifiés sont l’âge, le sexe, l’ethnie, la religion, l’état matrimonial, le niveau d’éducation, le statut professionnel, la capacité financière et la taille des ménages.
En conséquence, le profil des individus qui seraient exclus des systèmes de mutualisation du risque maladie, tel que révélé par la présente étude, est caractérisé par le jeune âge (inférieur à trente-cinq ans), une majorité de femmes, les familles de grande taille, à revenu faible de moins de 50 000 francs CFA.
La composante « éducation » des déterminants de l’adhésion aux mutuelles de santé rentre dans un cadre plus général des déterminants de la santé. Les personnes qui adhèrent aux mutuelles ont un niveau d’éducation plus élevé. Malgré le développement des mutuelles de santé, dont la capacité à protéger les adhérents contre le risque maladie du point de vue financier semble de plus en plus attestée, il persiste encore une population significative pour laquelle un besoin urgent d’obtenir une couverture sociale face au risque maladie se pose.
En conséquence, le profil des individus qui seraient exclus des systèmes de mutualisation du risque maladie, tel que révélé par la présente étude, est caractérisé par le jeune âge (inférieur à trente-cinq ans), une majorité de femmes, les familles de grande taille, à revenu faible de moins de 50 000 francs CFA
Des facteurs comme la cohésion du groupe, le sentiment d’appartenance au groupe, la confiance aux responsables des mutuelles sont essentiels pour l’adhésion des populations aux mutuelles. Car il s’agit d’organisations communautaires basées sur la solidarité. Dans une communauté, lorsque la solidarité est forte, les membres acceptent plus facilement que leurs cotisations servent à couvrir les soins de santé d’une autre personne.
Ce qui apparaît ici était le faible degré de connaissance et de compréhension des mutuelles par les populations. Ce manque d’information concerne l’existence même des mutuelles, les principes de leur fonctionnement, les prestations offertes et les avantages liés à l’adhésion. L’information n’atteint pas les cibles concernées car la majorité de la population, et en particulier les plus défavorisées, n’a pas accès à ces médias. L’analphabétisme de ces populations et leurs préoccupations quotidiennes ne leur permettent pas d’être au contact des médias pour y trouver l’information dont ils pourraient avoir besoin.
Les mutuelles de santé n’ont pas une politique de communication efficace capable de toucher les plus démunis les plans de communication sont souvent absents, et, s’ils existent les moyens utilisés sont ceux auxquels les populations défavorisées n’ont pas accès.
L’accès équitable aux soins est donc subordonné à l’accès à l’information.