Intégration de l’enseignement de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire du Bénin

Intégration de l’enseignement de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire du Bénin

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Auteurs : Florent Tasso & Monique Ouassa Kouaro

Type de publication : Papier de recherche

Date de publication : 2018

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Introduction

L’institution scolaire n’est pas en marge de l’explosion des technologies de l’information et de communication (TIC). L’intégration des TIC est d’autant plus inévitable dans le domaine de l’éducation qu’elle permet de favoriser l’accès à l’information ainsi que la réussite des apprenants, de rehausser le professionnalisme du personnel enseignant, d’encourager le leadership des gestionnaires, de favoriser les collaborations Sud-Sud et Nord-Sud, et, qu’elle offre de multiples solutions pour contrer plusieurs problèmes actuels de l’éducation en Afrique (Karsenti, 2006).

L’enseignement de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire apparaît dès lors comme un moyen d’initier les élèves aux fonctions principales de l’ordinateur, dans une perspective d’« alphabétisation technologique », tout en développant à la fois leur esprit critique, leurs capacités en matière de déontologie, de comportement en société, et leurs aptitudes à agir et à créer aussi bien au niveau personnel qu’en collaboration avec d’autres ou au sein d’une équipe (Kalogiannakis, 2014).

Sur près de 3 725 établissements d’enseignement secondaire et professionnel que comptait le Bénin en 2011, moins de 250 collèges et lycées étaient informatisés et seulement 20 avaient accès à Internet ou plutôt à une connexion bas débit d’environ 56 Ko/s

Dans le cas spécifique du Bénin, si les travaux de Dakpo et al. (2008) soulignent une prise de conscience de l’importance pédagogique des TIC par les différents acteurs du système éducatif, Dahé (2011) fait observer que de nombreux défis entravent l’intégration des outils informatiques dans l’enseignement secondaire public. Selon ce dernier auteur, sur près de 3 725 établissements d’enseignement secondaire et professionnel que comptait le Bénin en 2011, moins de 250 collèges et lycées étaient informatisés et seulement 20 avaient accès à Internet ou plutôt à une connexion bas débit d’environ 56 Ko/s. C’est donc à juste titre que Tasso (2015) fait observer que l’intégration des TIC en éducation reste encore problématique au Bénin, et que les établissements d’enseignement public peinent particulièrement à se mettre au pas de la mondialisation du savoir qu’impose la révolution du numérique.

Politique éducative du Bénin en matière d’introduction de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire

Plusieurs projets de construction/ équipement de salles informatiques dans les établissements, de formation des enseignants, d’élaboration d’un programme d’enseignement en informatique, etc. ont été ainsi mis en œuvre au cours de ces trois dernières décennies.

Il ressort toutefois de la triangulation des données des entretiens et des observations de terrain que les différents projets initiés n’ont pas véritablement permis d’introduire de façon durable l’enseignement de l’informatique dans les lycées et collèges. Les difficultés de maintenance de l’équipement informatique acquis se sont souvent accompagnées d’une nette dégradation de l’enseignement de l’informatique, avec la limitation et/ou la disparition des cours.

D’ici 2021, des actions concrètes seront mises en œuvre en vue d’introduire de façon durable l’informatique dans les lycées et collèges. C’est ce qui explique la prise en compte du numérique en éducation dans le programme d’action du gouvernement

En outre, au stade actuel de l’intégration de l’outil informatique dans tous les secteurs de la vie active, l’inexistence d’un document fixant le cadre législatif et réglementaire de l’usage des TIC dans les établissements d’enseignement secondaire apparaît comme un défi majeur. Pour autant, une autorité en charge du Ministère de l’Enseignement Secondaire et de la Formation Technique et Professionnel interviewée à Cotonou fait observer que « d’ici 2021, des actions concrètes seront mises en œuvre en vue d’introduire de façon durable l’informatique dans les lycées et collèges. C’est ce qui explique la prise en compte du numérique en éducation dans le programme d’action du gouvernement »

Malgré l’existence de ces facteurs de résistance à l’intégration de l’enseignement de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire, il est observé chez les élèves (tout comme chez les enseignants) un engouement particulier pour l’informatique. Près de 72 % des élèves interviewés ont été initiés à l’outil informatique dans les cybercafés. 

Compétences informatiques acquises par les acteurs du système éducatif d’enseignement secondaire

Dans les rares établissements où l’informatique est introduite dans les programmes de formation, le croisement des informations de terrain fait apparaître que son enseignement ne se limite qu’à une simple utilisation de base de l’ordinateur (écriture de textes, utilisation de quelques logiciels, tableur, etc.) et d’Internet. L’enseignement de l’informatique permet aux élèves de connaître les composantes de l’ordinateur et les objets manipulés comme le clavier, l’écran, la souris, le lecteur de cédérom, ou encore les icônes de l’interface. Il offre aux apprenants la possibilité d’acquérir des compétences élémentaires en matière d’utilisation de l’ordinateur.

La triangulation des informations de terrain révèle de fait que l’enseignement de l’informatique dans les lycées et collèges du Bénin permet aux élèves d’acquérir des compétences en matière de production de documents ; de gestion des fichiers ; de développement d’idées créatives ; d’utilisation de la messagerie électronique, de tableur et de système de bases de données ; de recherche d’informations sur Internet.

92 % des élèves interrogés et dont les établissements exploitent les outils informatiques estiment que l’enseignement de l’informatique leur permet d’acquérir des compétences en matière de production de documents, contre 85 % pour la gestion des fichiers. Les compétences spécifiques liées à la recherche d’informations sur Internet et à l’utilisation de la messagerie électronique représentent respectivement 41 % et 35 %. Ces deux dernières proportions s’expliquent par les difficultés d’accès des établissements équipés d’outils informatiques à Internet. Les compétences les moins acquises par les élèves sont celles relatives à l’utilisation de tableurs et de systèmes de base de données.

L’enseignement de l’informatique en classe offre la possibilité d’une transformation profonde de la relation pédagogique enseignant-élève, car il contribue à former des élèves d’un type nouveau, encadrés par des enseignants ayant des pratiques pédagogiques nouvelles

Par ailleurs, l’enseignement de l’informatique en classe offre la possibilité d’une transformation profonde de la relation pédagogique enseignant-élève, car il contribue à former des élèves d’un type nouveau, encadrés par des enseignants ayant des pratiques pédagogiques nouvelles. D’ailleurs, 82 % des enseignants interrogés estiment que l’introduction de l’informatique dans les curricula de formation est indispensable pour une formation scolaire adaptée aux réalités du XXIe siècle. Il s’agit d’une technologie utile non seulement aux étudiants mais aussi aux enseignants, car elle permet de développer de « nouvelles » pratiques pédagogiques enrichies (Bonnot et al., 2013).

Toutefois, il convient de préciser que les facteurs de résistance à l’introduction de l’enseignement de l’informatique dans les lycées et collèges du Bénin sont presque similaires aux obstacles observés dans la plupart des pays d’Afrique. En effet, les travaux de Karsenti et al. (2012), qui ont porté sur des initiatives en cours dans plus de cent écoles d’Afrique, montrent que l’introduction de l’informatique dans les systèmes éducatifs reste encore faible. Ces auteurs précisent en effet qu’en tant que « région nettement en retard en matière d’adoption, d’utilisation et d’innovation des TIC, l’Afrique ne permet pas encore à ses populations de bénéficier d’une meilleure éducation, voire des possibilités et opportunités d’investissement qu’offrent les TIC en éducation ».

Au regard de cette situation, une véritable intégration de l’informatique dans les établissements d’enseignement secondaire dans le contexte béninois nécessite un changement en profondeur des conceptions de tous les acteurs en présence, voire de l’enseignement au niveau des contenus ainsi que de la forme des activités. Le nouveau rôle de l’enseignant dans ladite situation d’enseignement demande de nouvelles compétences que l’enseignant doit acquérir

Conclusion

Dans le but de promouvoir une intégration durable de l’enseignement de l’informatique dans les lycées et collèges du Bénin, quelques mesures méritent d’être prises. Il s’agit notamment de : l’électrification (solaire) des établissements secondaires ; la détermination des autorités politico- administratives ; l’adoption d’une politique sectorielle en matière d’introduction des TIC dans le système éducatif ; l’équipement informatique et la connexion Internet des établissements d’enseignement secondaire ; l’initiation de classe intelligente pilote ; le recrutement d’enseignants spécialisés en informatique ; la formation et le renforcement des capacités des enseignants à l’utilisation des TIC ; l’intégration de l’informatique dans les curricula de formation ; la création de bibliothèques numériques connectées à Internet ; la création d’une plateforme de gestion et de suivi des statistiques scolaires ; la mise en place d’une plateforme web d’apprentissage ; l’allocation d’un budget alloué à la maintenance de l’équipement informatique ; la résolution des problèmes récurrents à l’école béninoise (insuffisance d’infrastructures pédagogiques, d’enseignants et de mobiliers).