Évaluation des plans, politiques et directives liés à la gestion à long terme des inondations et de la sécheresse dans la portion béninoise du Bassin de la Volta, World meteorological organization, 2022

Évaluation des plans, politiques et directives liés à la gestion à long terme des inondations et de la sécheresse dans la portion béninoise du Bassin de la Volta, World meteorological organization, 2022

Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.

Auteur : Dr. Fabien C. C. HOUNTONDJ

Organisation :  World meteorological organization

Type de publication : Rapport 

Date de publication : Janvier 2022

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Introduction

Le climat du Bénin, à l’instar des autres pays d’Afrique de l’Ouest, est soumis à la variabilité et aux changements climatiques qui se caractérisent par une augmentation de la fréquence des années déficitaires (ou sèches). Ceci se traduit aussi par une tendance générale au glissement des isohyètes vers le Sud. 

Les températures connaissent aussi des variations du fait du réchauffement global de la planète. Dans la période 1960 – 2009, la température annuelle moyenne au Bénin a connu une augmentation de 1.3°C, avec une diminution de nombre de nuits froides et une augmentation de nombre de jours chauds (Rapport PANA, 2008). Les observations ont aussi montré une tendance à la hausse des températures maximales dont la moyenne a augmenté au cours de la période 1971 – 2000 par rapport à la période 1940 – 1970. 

Les projections climatiques à l’horizon 2050 prévoient qu’au Bénin la température pourrait connaitre une augmentation qui varie entre 1°C et 2,5°C et quant à la pluviométrie elle pourrait révéler une variation entre -200 et 200 mm d’eau (GIZ, 2018). 

Le relief du Bénin ne présente pas de grandes dénivellations : on dit qu’il est peu accidenté. La région de la chaîne de la chaîne de l’Atacora est la seule région accidentée dépassant 400 m. L’ensemble est constitué par quatre formes principales à savoir : la plaine côtière, les plateaux, la pénéplaine cristalline et la chaîne de l’Atacora. 

Le Bénin est drainé par un assez dense réseau hydrographique comportant plusieurs cours d’eau à régime d’écoulement saisonnier avec des débits de crue relativement importants contre des débits d’étiage quasi nuls dans la plupart des cas. Actuellement, le pays est subdivisé en quatre (04) grands ensembles hydrographiques qui se présentent comme suit : 

Ensemble hydrographique du Niger : le fleuve Niger (120 km), la rivière Sota (250 km), la rivière Alibori (338 km) et la rivière Mékrou (410 km) ; 

Ensemble hydrographique de la Volta : la rivière Pendjari (380 Km) 

Ensemble hydrographique de l’Ouémé-Yéwa : le fleuve Ouémé (510 Km) et ses principaux affluents l’Okpara (200 Km) et le Zou (150 Km), la lagune de Porto-Novo (35 km²), le lac Nokoué (150 km²) 

Ensemble hydrographique du Mono-Couffo : le fleuve Mono (100 Km), le fleuve Couffo (190 Km), le lac Ahémé (78 km²), la lagune de Ouidah (40 km²), le lac Toho (15 km²), la lagune de Grand-Popo (15 km²). 

 

 Changement climatique et évènements extrêmes (inondations et sécheresses) 

Une inondation est la submersion par des eaux douces ou salées d’une zone généralement émergée. La sécheresse (selon l’OMM) est une période sèche prolongée dans un cycle climatique naturel, susceptible de se produire n’importe où à la surface de la terre. Il s’agit d’un phénomène insidieux causé par un déficit pluviométrique. La pauvreté et une gestion non durable des terres sont des facteurs susceptibles d’accroître la vulnérabilité à la sécheresse. 

Les décennies 1980 – 2020 ont connu des évènements climatiques extrêmes, notamment les inondations et parfois la sécheresse au Bénin. 

Les inondations sont de plus en plus récurrentes et aggravantes au Bénin ces dernières décennies notamment avec la variabilité et les changements climatiques. Cependant, la capitalisation de ces impacts est longtemps restée laconique, superficielle voire absente. 

En effet, depuis les trente dernières années, les impacts des inondations rapportés (Deuxième Communication nationale sur les changements climatiques, 2011) sont de plusieurs ordres : 

  • au plan socio-humanitaire : pertes en vies humaines, destruction des habitations causant des sans-abris, destruction/ dégradation des greniers et stocks, installation d’épidémies ; 
  • au plan économique : destruction des cultures, perte de cheptel, blocage/réduction des activités de transformation, de commerce etc. ; 
  • au plan des infrastructures : destruction/ dégradation de pistes, ponts, routes, d’ouvrages d’eau et d’assainissement, et d’autres infrastructures telles que les écoles et centres de santé. 

Des inondations significatives sont de plus de plus récurrentes et sont susceptibles de se passer une fois les deux ou trois ans et parfois même en années successives dans la période. Les inondations sont plus récurrentes dans le bassin de l’Ouémé avec le littoral en particulier. Elles sont fréquentes mais dans une moindre mesure dans le bassin du Mono et la portion béninoise du bassin du Niger. Dans la portion béninoise du bassin de la Volta, les rapports nationaux sur les inondations sont limités, une en 1984 et une en 2010. Il faut reconnaître que les inondations n’ont fait l’objet de rapport détaillé de situation et d’analyse qu’à la suite des inondations de 2010. Elles sont donc peu documentées, en particulier celles qui n’ont pas eues une attention nationale. 

Quant à la sécheresse, elle est plus connue sur le plan de la sécurité alimentaire à travers les mauvaises récoltes et la perte de cheptel. De 1984 à 2020, une seule sécheresse sévère a été rapportée. 

Inondations et sécheresses dans la portion béninoise du bassin de la Volta : impacts et vulnérabilité 

Cette même étude révèle que les secteurs les plus frappés par les inondations dans la Portion Nationale du Bassin de la Volta (PNBV) incluent les secteurs de l’agriculture, de l’habitat, des routes et des transports, et du tourisme. Les résultats d’enquête avec les communautés riveraines confirment la prépondérance des impacts dans ces secteurs et reconnaissent des impacts sur le secteur de l’énergie. Les enquêtées dans la commune de Boukoumbé en particulier révèlent tous que des pertes en vies humaines variant entre un et trois morts font parfois suite aux inondations. 

Le secteur de l’agriculture – l’impact des inondations est ressenti, comme à l’image de tout le pays, notamment à travers les pertes de cultures signalées par tous les acteurs. 90% et 81% des enquêtés ont déclaré que les inondations causent des pertes de cultures et des pertes d’animaux, respectivement. 

Le secteur de l’habitat – ce secteur est impacté surtout à travers la dégradation des habitations précaires et la stagnation de l’eau qui créent des sans abri. Les impacts les plus fréquents sur ce secteur sont associés à des phénomènes d’orages ou de pluies accompagnées de vents violents ; 67%, des enquêtés ont déclaré que les inondations causent des sans abri.

Le secteur des routes et des transports – l’impact sur ce secteur est lié à la topographie des zones d’inondation et des phénomènes d’érosion qui s’en suivent. 92% des enquêtés affirment que les infrastructures (routières, hydrauliques, sanitaires et scolaires etc.) sont affectées par les inondations et 78% trouvent que les routes sont les plus affectées, 22% pour les autres infrastructures. Les pistes et les ponts qui sont le plus souvent précaires et d’accès difficile subissent plus vite et régulièrement ces phénomènes d’inondation isolant plusieurs villages voire des arrondissements lorsque les inondations sont intenses. 

Le secteur du tourisme – les inondations impactent ce secteur pendant les périodes de crues saisonniers et participe déjà à la régulation du tourisme qui est saisonnier. L’impact est limité au blocage des circuits touristiques. Ces inondations sont vues comme des phénomènes naturels qui se passent surtout en aval des pentes ouest des chaines de l’Atacora à la frontière avec le Togo. Les impacts liés à la variabilité ou au changement climatique qui est source d’incertitude ont pour conséquence d’entraver certaines visites touristiques. 

Autres secteurs – 48% des enquêtés parmi les communautés rurales trouvent que l’énergie est négativement impactée. Le type d’énergie impacté est le bois-énergie selon eux tous, avec une humidification prolongée des bois qui restent inappropriés pour le feu pendant la durée de l’inondation.

Prévision et alerte précoce du pays/bassin

A la suite des inondations de 2010, le Bénin dispose depuis 2013 d’un projet de développement d’un système d’alerte précoce intitulé « Renforcement de l’information sur le climat et systèmes d’alerte précoce en Afrique pour un développement résilient au climat et adaptation aux changements climatiques : Bénin » (Projet SAP-Bénin). Avant ce projet, les systèmes existants se concentrent uniquement sur les crues ou les prévisions de famine dans des régions spécifiques à l’intérieur du pays et fonctionnent sans coordination entre eux. De plus, les alertes étaient peu fiables ou inexistantes. Ce qui a amené à la mise en place du projet SAP qui assure la coordination des actions de prévision et d’alerte.

D’autres difficultés entravent aussi le bon fonctionnement des prévisions et alertes ainsi que suit : 

La communication des messages d’alertes de la préfecture aux communes n’a pas fonctionné comme attendu. Cela s’explique par l’inexistence d’un support d’interprétation des messages d’alerte reçu tel un manuel du point focal de prévention et de réduction des catastrophes naturelles, et l’utilisation de l’ancien dispositif de prévention des catastrophes climatiques. 

Au niveau de toutes les administrations territoriales visitées, la mission note que les principaux responsables et les PF ne disposent pas de classeur d’archivage et de gestion de dossiers relatifs aux alertes précoces. 

Par ailleurs, ils ne diffusent pas les échéances de survenue des risques, et ne diffusent non plus les messages de fin d’alerte. Il en résulte des interprétations inappropriées des messages d’alerte, entraînant la baisse de crédibilité des messages d’alertes précoces du SAP. 

Les déficits de ressources financières des mairies affectent la sollicitation des radios locales, car il y aurait d’importantes dettes des mairies à l’égard de ces media. 

L’absence de moyens logistiques tels que les moyens de déplacement, les matériels de localisation géographique (GPS) etc. 

Esquisse d’un plan d’action national à long terme pour le renforcement des capacités de résilience au niveau national 

Bien que des efforts soient engagés pour la protection civile et la réduction des risques de catastrophe de façon globale, le constat reste que beaucoup attend d’être fait pour parvenir à une résilience durable des communautés. Si beaucoup de dispositions légales relatives à la question sont prises, il n’en demeure pas moins que ces textes juridico politique et stratégiques soient beaucoup plus sectoriels et peu spécifiques à adresser efficacement les défis. Des dispositions institutionnelles et organisationnelles spécifiques sont mises en place mais souffrent dans leur fonctionnement. La mise en œuvre efficiente des plans stratégique et opérationnel de prévention et de réduction des risques et catastrophes d’inondation au Bénin nécessitent des efforts considérables de renforcement de capacités des parties prenantes de ces processus afin de combler les lacunes et insuffler un véritable potentiel de développement de la résilience des communautés. 

Cinq axes de besoins ou recommandations pour le renforcement des capacités pour la promotion de l’approche de gestion intégrée des inondations au niveau national et dans la PNBV émergent de l’état des lieux dressés ci-dessous et des priorités d’action du Cadre d’Action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe pour la période 2015-2030 ainsi que des ODD : 

  • Axe 1 : Renforcement, harmonisation et adaptation du cadre législatif pour le financement et la gestion durables des risques d’inondation et de sécheresse au niveau national et dans la PNBV 
  • Axe 2 : Renforcement du cadre organisationnel de préparation et de réponse aux risques et catastrophes d’inondation et de sécheresse au niveau national et dans la PNBV 
  • Axe 3 : Développement de la connaissance et de l’information sur les risques d’inondation et de sécheresse au niveau national et dans la PNBV 

Les acteurs bénéficiaires potentiels incluent notamment : 

  • Les communautés rurales et urbaines du Bénin et de la portion béninoise du BV 
  • les acteurs du plan ORSEC 
  • les acteurs sectoriels (assainissement, eau potable, gestion des déchets solides, santé, éducation, agriculture, transport, etc.), 
  • les acteurs territoriaux (préfectures, communes, arrondissements, quartiers, villages…), 
  • les ONG et associations.