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Auteur : Banque mondiale
Site de publication : La banque mondiale
Type de publication : Rapport mensuel
Date de publication : Mai 2024
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S’adapter au changement climatique pour une croissance économique durable et résiliente
La mise en œuvre de mesures d’adaptation au climat, telles que décrites dans le Plan national d’adaptation du Bénin, est essentielle pour atténuer les pertes économiques et favoriser une croissance durable. La réduction du PIB pourrait être limitée à 5,4 % d’ici les années 2030 et à 11 % d’ici 2050.
Donner la priorité à l’adaptation et à la résilience pourrait réduire considérablement la pauvreté et permettre à près d’un demi-million de personnes de passer au-dessus du seuil de pauvreté par rapport à un scénario où aucune mesure politique ne serait prise.
La diversification de l’agriculture béninoise, qui s’éloigne du coton, va dans le sens de l’adaptation au climat. Les cultures à fort potentiel comme l’ananas et le soja pourraient être améliorées, ce qui les rendrait plus résistantes au changement climatique. Le ministère de l’agriculture doit être soutenu pour mettre en œuvre sa stratégie d’agriculture intelligente face au climat. En outre, le gouvernement doit soutenir les pratiques durables, la sécurité foncière et les technologies résistantes au climat afin de réduire l’empreinte carbone de l’agriculture et d’améliorer la résistance au climat.
Le renforcement de la résilience aux inondations urbaines et l’investissement dans des infrastructures de transport et numériques résilientes permettront aux personnes et aux marchés de rester connectés. Les villes doivent de toute urgence mettre à jour les réglementations en matière d’urbanisme et de zonage afin de tenir compte des risques climatiques, compte tenu de l’urbanisation et de la croissance démographique rapides. Le développement urbain compact permet non seulement de réduire les émissions et les coûts d’infrastructure, mais aussi de préserver les espaces verts et les terres agricoles.
Le réseau routier rural du Bénin est vulnérable aux chocs climatiques, 23 % seulement de la population rurale ayant accès à des routes praticables par tous les temps. Le réseau est confronté à des risques de précipitations extrêmes, de chaleur de feux de forêt, avec un risque d’inondation des routes urbaines dans un scénario d’inondation de 1 an sur 100.
S’adapter au changement climatique pour une croissance économique durable et résiliente
Le Bénin est l’un des pays les plus vulnérables au changement climatique, se classant au 152e rang sur 181 pays en termes de vulnérabilité climatique extrême. Sa structure économique, qui repose sur l’agriculture et l’emploi informel, rend sa trajectoire de développement très vulnérable au changement climatique en l’absence d’une adaptation efficace.
Les canaux de transmission prédominant sont l’agriculture et l’utilisation des terres, les infrastructures urbaines et de réseau, et le capital humain (éducation, santé) à travers son impact sur la productivité du travail.
Le coût macroéconomique de l’inaction reste élevé
La Banque mondiale 2023 estime que les pertes de PIB réel dues aux effets du changement climatique passeront de 7 % en moyenne dans les années 2030 à 11 % d’ici 2050 dans un scénario de climat chaud/humide, par rapport au scénario de référence, et de 9 % en moyenne dans les années 2030 à 19 % d’ici 2050 dans des scénarios plus pessimistes de climat chaud/sec. La perte de productivité due au stress thermique de la main-d’œuvre reste la principale source de pertes économiques dues au changement climatique : le PIB par habitant devrait être inférieur de plus de 18 % au niveau de référence d’ici à 2050 dans le scénario chaud/sec.
Dans l’ensemble, en cas de températures plus élevées, le choc négatif de la productivité du travail sur le PIB devrait atteindre 6,6 % en 2035 (11,9 % en 2050) dans un scénario chaud/sec, et 4,4 % (8,3 % en 2035) dans un scénario chaud/humide. Le stress thermique devrait réduire la productivité du travail dans tous les secteurs, mais surtout dans l’agriculture et l’industrie. La perte de productivité globale dans tous les secteurs (primaire, secondaire et tertiaire) pourrait aller de 6,5 à 18% en 2041-50.
Alors que le gouvernement vise à réduire considérablement la pauvreté d’ici à 2030 (dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement), entre un demi-million et un million de personnes supplémentaires resteront dans la pauvreté d’ici à 2050 si aucune mesure d’adaptation n’est prise. Les femmes et les travailleurs qui manquent de compétences seront les plus touchés. Les zones rurales affichent des taux d’incidence de la pauvreté plus élevés que les zones urbaines : 20 % contre 17 %, respectivement. Les disparités régionales dans les perspectives de réduction de la pauvreté sont également notables. Alors que les régions du sud (telles que le Littoral et l’Ouémé) devraient maintenir des taux de pauvreté faibles d’ici 2050, les simulations suggèrent que dans d’autres régions, telles que les Collines (dans le centre du pays), la réduction de la pauvreté sera difficile en l’absence d’adaptation.
Préserver la formation du capital humain, tout en investissant dans une agriculture durable, ainsi que dans l’adaptation urbaine et les infrastructures résistantes, sera essentiel pour une transformation structurelle résiliente
Le Bénin dispose d’une capacité d’eau abondante, avec un potentiel d’eau souterraine estimé à environ 1,87 milliards de m3, et des eaux de surface d’environ 13 milliards de m3 par an. Cependant, les pénuries saisonnières locales d’approvisionnement en eau sont courantes pendant les saisons sèches, et le volume des eaux de surface devrait être réduit dans des conditions climatiques plus chaudes et plus sèches. Cela augmentera la concurrence pour les eaux de surface entre les usages domestiques, l’agriculture et l’élevage
Certaines cultures sont plus résistantes aux effets du changement climatique que d’autres, comme le sorgho. Une meilleure disponibilité et accessibilité des intrants spécifiques aux cultures, tels que les variétés de semences améliorées, les semis, les engrais et les produits phytosanitaires, en combinaison avec des pratiques agricoles améliorées, sont nécessaires pour une production plus résiliente. Le ministère de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche (MAEP) a préparé et adopté une stratégie sur l’agriculture intelligente face au climat afin de freiner la déforestation en augmentant le rendement des terres arables. Les communautés ont souvent mis en place leurs propres stratégies locales, notamment l’échelonnement des plantations, l’utilisation de variétés à cycle court, l’utilisation intégrée d’engrais et la diversification des sources de revenus. Toutefois, la mise en œuvre de ces stratégies dans la pratique est fragmentée et n’a que des effets à petite échelle en raison des ressources financières limitées.
Par exemple, le beurre de karité est déjà un produit d’exportation important et offre des opportunités d’emploi positives pour les femmes et les jeunes, qui dominent la main-d’œuvre dans la chaîne de valeur. La préservation des forêts de mangroves protège non seulement contre les inondations et l’érosion côtière, mais crée également des opportunités d’écotourisme (avec des retombées positives pour l’autonomisation économique des femmes) et stimule la sécurité alimentaire.
L’insuffisance de l’approvisionnement en eau et le recours limité à l’irrigation en raison de la dépendance à l’égard de l’agriculture pluviale tendent à réduire la productivité des agriculteurs et, partant, la production. Les investissements dans les infrastructures hydrauliques multifonctionnelles et la gestion intégrée des ressources en eau sont essentiels pour la mécanisation de l’agriculture et de l’exploitation commerciale. La poursuite de la mise en œuvre du Plan d’action national pour la gestion intégrée des ressources en eau, 2011-25 (PANGIRE) est essentielle pour soutenir l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets.
Le développement urbain non planifié est particulièrement préoccupant à Cotonou et dans les autres agglomérations côtières du sud où réside la majorité de la population, car elles sont très vulnérables à l’élévation du niveau de la mer, à l’augmentation des températures, à l’érosion côtière et aux inondations – des facteurs qui réduisent la productivité économique lorsqu’ils sont présents. Les villes secondaires du nord et du centre sont confrontées à des chaleurs extrêmes qui tendent à accroître le stress de la main-d’œuvre et à réduire la productivité et la production.
Le sud, où se concentre la majeure partie de la population urbaine et des activités économiques, est sujet à de fortes précipitations et à des inondations. Une évaluation des catastrophes historiques signalées entre 1990 et 2018 révèle un impact significatif des événements naturels défavorables. Les chocs naturels récurrents ont entraîné pour le Bénin des pertes annuelles moyennes de 0,26 % du PIB (par rapport au PIB de 2019) et une réduction de la consommation de 0,53 % du PIB national. Les inondations détruisent les infrastructures essentielles qui soutiennent la croissance de l’industrie.
Compte tenu de la croissance rapide de la population et du taux d’urbanisation, il est urgent de mettre à jour les documents de planification urbaine et les règlements de zonage afin de prendre en compte les risques climatiques.
Ceux-ci constituent certains des outils les plus efficaces pour répondre au changement climatique. Un développement urbain compact et coordonné est associé à une réduction des émissions, à une diminution des coûts d’infrastructure à long terme, à une augmentation des espaces verts et à la protection des terres agricoles et forestières. Le développement spatial étant largement irréversible, le temps est un facteur essentiel.
Compte tenu des taux de croissance rapides, les 5 à 10 prochaines années pourraient être cruciales pour déterminer la productivité, la résilience et la durabilité des villes du pays à très long terme.
Le tourisme est un secteur hautement prioritaire pour l’économie et le deuxième générateur de recettes en devises du pays (après le coton), et l’intégration de la résilience climatique dans le tourisme sera cruciale pour la durabilité du secteur. Le tourisme a le potentiel d’augmenter de manière significative la contribution du secteur des services du Bénin à la croissance. Les recettes du tourisme international se sont élevées à 241 millions de dollars US en 2019, représentant près de la moitié des exportations de services du pays, et le gouvernement vise une contribution de 10 pour cent d’ici 2030.
À ce jour, cependant, peu de mesures de durabilité environnementale ont été mises en œuvre ou considérées comme prioritaires dans le secteur. En dehors des zones protégées, le secteur privé et le gouvernement n’accordent pas encore la priorité à la durabilité et à l’écologisation, en partie parce que leur clientèle, essentiellement composée d’hommes d’affaires, n’accorde pas d’importance aux mesures durables.
Les événements liés au climat entravent la circulation sur les principales artères des villes, perturbent la mobilité urbaine et aggravent les impacts sur un secteur urbain non préparé. Près de 4 000 kilomètres (soit 12 %) de l’ensemble des réseaux routiers urbains seraient directement exposés à un certain niveau d’inondation dans le cadre d’un scénario d’inondation de 1 sur 100 ans.
La stratégie de développement des transports du gouvernement est fortement axée sur le secteur routier. Cependant, une prise en compte plus systématique de la contribution potentielle d’autres modes de transport, tels que le rail et les voies navigables, permettra d’adopter une approche plus holistique face aux nombreux défis qui nous attendent. Par exemple, le développement du transport fluvial pourrait contribuer à relever les défis d’adaptation et d’atténuation de la mobilité urbaine à Cotonou et dans la région du Grand Nokoué.
Le capital humain doit être mis à l’épreuve du climat
En tant que pays avant dividende démographique, le Bénin peut tirer parti de la croissance de sa population jeune pour augmenter la productivité et la croissance par habitant. La rapidité de la transition démographique et les politiques de développement économique et humain qui l’accompagnent peuvent être à l’origine de la prochaine vague de croissance économique, à condition que des jeunes en meilleure santé et mieux éduqués entrent sur des marchés du travail en expansion. Les écarts sont toutefois importants : un enfant né aujourd’hui au Bénin sera 40 % moins productif à l’âge adulte qu’il ne l’aurait été s’il avait bénéficié d’une éducation complète et d’une bonne santé.
La hausse des températures et la fréquence accrue des vagues de chaleur, qui devraient être plus prononcées dans le nord, entraîneront une augmentation des cas de maladies à transmission vectorielle. Le paludisme est déjà l’une des principales causes de décès. Le stress thermique entraîne également une augmentation des maladies non transmissibles. En outre, le changement climatique présente des défis uniques pour la santé maternelle, sexuelle et reproductive des femmes. Dans les régions où les sécheresses sont plus prononcées, les cas de déshydratation augmenteront, ce qui peut être fatal pour les personnes âgées et les enfants, tout comme la malnutrition et d’autres conditions (en raison de la perte de rendement des cultures).
Quelques projets gouvernementaux visent à relever certains des défis liés au changement climatique, mais le manque de financement dans le secteur rend difficile l’extension de ces interventions. Deux projets soutiennent l’adaptation au changement climatique dans le secteur de la santé : (i) le Programme d’appui aux activités de santé de la reproduction (PAASR), qui vise à améliorer la qualité et l’accessibilité des services de santé maternelle et infantile ; et (ii) le Programme national de réhabilitation et de construction d’hôpitaux (PNRCCH), qui vise à contribuer à l’amélioration de la qualité et de l’accessibilité des soins et des services de santé.
2.3 Principales options politiques et financières pour une croissance plus résiliente et la réduction de la pauvreté :
- Améliorer la mobilisation des ressources nationales par l’introduction de nouvelles taxes liées au climat, comme une taxe sur le carbone à moyen terme, tout en augmentant l’efficience des dépenses publiques afin de créer une marge de manœuvre budgétaire pour l’adaptation.
- Exploiter les financements concessionnels et mixtes ainsi que le financement des risques de catastrophe. Le Bénin utilise déjà des instruments financiers innovants pour financer son programme de développement. Dans ce contexte, le pays devrait maximiser la gamme complète des financements concessionnels et semi-concessionnels disponibles, y compris les nouvelles sources de fonds climatiques. Plusieurs nouvelles institutions financières étendent le champ de leurs activités à l’Afrique, créant ainsi un potentiel pour de nouveaux financements mixtes.
- Mobiliser les investissements des entreprises et du secteur privé par le biais de PPP assortis de montages financiers attrayants. Pour attirer les financements du secteur privé, il faudra approfondir le secteur financier, mettre en place un cadre juridique approprié et faire en sorte que le gouvernement soit disposé à s’engager avec d’autres acteurs.